PRELUDE DE PRADES – Concert au Théâtre des Champs-Elysées, le 5 février 2015
Abbaye Saint-Michel-de-Cuxa © Nemo Perier Stefanovitch
Le Festival Pablo Casals de Prades soufflera cet été 2015, ses 65 bougies et c’est maintenant depuis 22 ans qu’il offre en plus, au public parisien du Théâtre des Champs Elysées, une série de concerts de musique de chambre, très appréciée.
Ce 5 février 2015, le quintette était à l’honneur avec les oeuvres de Mozart, Brahms et Dvorák. Un programme intelligemment construit puisqu’il couvrait un large spectre offrant un panorama contrasté et passionnant. Comme à son habitude, le charismatique directeur artistique Michel Lethiec a réuni une belle équipe autour de lui. Dans la première partie, il accompagnait le Quatuor Talich -fil rouge de la soirée- dans le Quintette pour clarinette et cordes K. 581 de Mozart. Dans le Quintette à cordes n° 2 en sol majeur op. 111de Brahms, Nobuko Imai assurait la partie d’alto II et enfin, Jean-Philippe Collard au piano, complétait le Quintette de Dvorák, au programme de la deuxième partie.
Talich Quartet © Bernard Martinez
Le violon très raffiné de Jan Talich était tout à fait remarquable dans le Mozart offrant son son délicat à la poésie du compositeur. Le deuxième mouvement Larghetto, bien connu des mélomanes, nous a même offert un de ces moments de grâce, lorsque le temps semble suspendu avec la clarinette experte mais un peu raide de Michel Lethiec.
Après cette très belle interprétation, les artistes ont maintenu leur niveau d’excellence dans le Brahms, offrant un son plein dans le premier mouvement, aux relents symphoniques. A la différence du Mozart, la partition du compositeur allemand n’est pas un concerto déguisé mais elle propose plutôt une suite de dialogues où les instrumentistes ont fait preuve d’une belle cohérence. Elle nous a permis d’apprécier le son fruité de Vladimír Bukac, l’altiste du quatuor et les attaques précises des solistes dans un troisième mouvement puissant. Le quatrième mouvement, d’une veine plus folklorique a offert un lien parfait avec le Quintette pour Piano de Dvo?ák, s’inspirant de la Dumka ukrainienne.
Jean-Philippe Collard s’est montré un partenaire délicat, en se fondant parfaitement dans la musique. Le deuxième mouvement a été l’occasion d’un dialogue très poétique avec l’alto.
Michel Lethiec © Josep Molina
Deux concerts compléteront cette soirée idéale de musique de chambre, au Théâtre des Champs-Elysées. Les artistes habitués de Prades comme Boris Brovtsyn, Arto Noras, André Cazalet, pour n’en citer que trois, se retrouveront les 20 et 21 mars 2015. Le programme crescendo du premier soir sera composé d’un Quintette de Haydn, du Sextuor de Mendelssohn puis de l’Octuor de Schubert. La deuxième soirée s’articulera autour des Lieder eines fahrenden Gesellen et du Quatuor pour piano de Mahler avec le merveilleux Quintette pour piano de Brahms et un arrangement pour cinq instruments du célèbre Till Eulenspiegel de Richard Strauss.
La programmation de l’édition 2015 du 65ème Festival Pablo Casals de Prades (qui aura lieu du 26 juillet au 13 août 2015) est déjà connu et comme toujours, elle est tout simplement brillante. Bien évidemment, elle rendra hommage à son créateur, le merveilleux Pablo Casals.
Pablo Casals © Festival Pablo Casals de Prades
C’est dans cette ville que le grand musicien a trouvé refuge pendant la guerre d’Espagne. C’est ici qu’il a résidé pendant la deuxième guerre mondiale. Et parce qu’il ne voulait plus sortir de son exil, les musiciens sont venus à Prades pour que « l’Art du Maître ne soit pas condamner au silence ». Grâce au pianiste Mieczyslaw Horszowski (à qui l’on doit ses propos) ayant réussi à le convaincre et avec l’aide d’Alexander Schneider, le 2 juin 1950, le Festival J.-S. Bach de Prades voit le jour. Les plus grands artistes internationaux souhaitent participer au Festival pour jouer avec la légende vivante et pour apprendre. C’est en 1966 que Pablo Casals se produira pour la dernière fois à l’abbaye Saint-Michel de Cuxa, dans le cadre de la manifestation qui a pris rapidement le nom de Festival Pablo Casals de Prades.
Depuis 1983, le célèbre clarinettiste Michel Lethiec, à la direction artistique, maintient avec succès la tradition de la rencontre. Le festival a bien évidemment évolué, proposant maintenant une quarantaine de manifestations mais l’esprit de Casals demeure. Au dire de Michel Lethiec, « il n ‘y a pas de stars mais de grands artistes au service des autres, compositeurs, interprètes, auditeurs… ». Preuve, s’il en fallait, qu’en toute modestie, le Festival Pablo Casals de Prades mérite sa place parmi les plus grands festivals de musique du monde.
Hugues Rameau-Crays
Music & Opera – 12 février 2015