Les ombres de Tartuffe se suivent mais ne se ressemblent pas forcément.
Bien sûr le texte est strictement le même et la perruque de Jean-Baptiste se retournerait dans sa fosse si l’on devait y changer une virgule. Si ce ne sont les personnages, eux aussi immuables, ce sont les personnes qui ont changé depuis la dernière production du Théâtre de la Porte Saint-Martin l’année dernière, qui prête une nouvelle fois son décor somptueux à ce classique du classique. Tartuffe est monstrueux. Manipulateur. Menteur. Trompeur. Mais quand il est joué par un monstre sacré, il est vrai. Il est l’évidence. Il est divin. Pierre Arditi est un vrai Tartuffe. Sournois. Espiègle. Malin. Sans jamais tombé dans sa propre caricature, il est ce qu’a écrit l’auteur. Il est le texte. Les mots. Le souffle de Tartuffe. L’air de rien. Naturellement. Il respire le Tartuffe.
A l’instar de l’autre star du plateau, Jacques Weber, la force de la nature. Tonitruant. Enorme. Ce n’est plus le souffle, c’est la tempête. Violent. Impressionnant. Renversant. Ces deux monuments aux vivants parlent la langue de Molière couramment. Sans accent. Sans faute. Point. Isabelle Gélinas les accompagne et délie le texte quand la jeune génération parfois le délire. Mais sans heurts. Elle, le raisonne. Elle le gâte. Et nous avec.
Nous nous régalons devant cette œuvre de chef, servie par maitre Jacques qui n’est pas avare et maitre Pierre par le menu. La mise en scène de Peter Stein est d’un classicisme contemporain maitrisé. Décors et costumes, dignes d’une croisière de luxe. D’un autre temps. Indéfinissable mais parfaitement dans le ton. Ils sont tous à l’unisson, magnifiquement bons, portés par deux grandes voix timbrées et une soprane éclatante de justesse. Du beau, du grand, du théâtre total, classique certes, mais moderne, résolument.
Représentations du mardi au vendredi à 20h.
Le samedi à 20h30. Le dimanche à 16h.